Rencontre avec Jacques Vigner (X 1985), Grand donateur de la Fondation

Diplômé de l’École polytechnique et de l’École des Mines, Jacques Vigner a à son actif plus de 25 ans de carrière dans la finance. Ce passionné de mathématiques est aujourd’hui l’un des membres de l’Executive board de BNP Paribas Global Markets, dont les salles de marchés présentes dans le monde entier proposent des solutions en matière d'investissement, de couverture et de financement. Rencontre avec l’un des Grands donateurs de la première heure de la Fondation qui se mobilise une nouvelle fois pour son Alma Mater en organisant un class gift à l’occasion du 40e anniversaire de sa promotion.
25 juin. 2025
Portrait

Quelles ont été les grandes étapes qui ont jalonné votre parcours ? 

J’ai intégré l’X en 1985 après deux années de prépa à Poitiers dont je suis originaire. Dès le lycée, j’ai eu la chance de bénéficier de professeurs mémorables, notamment en mathématiques, qui m’ont inculqué des principes d’exigence et de rigueur. Après une année de service militaire qui m’a paru interminable, le cursus académique de Polytechnique, de deux ans à l’époque, m’a semblé beaucoup trop court ! Pour moi, l’X a été un festival de challenges passionnants, et j’aurais voulu pouvoir approfondir toutes les matières enseignées… Le cursus actuel me paraît meilleur, avec un trimestre en plus et la possibilité de se spécialiser. Mon rêve aurait été de faire de la recherche en mathématiques ou en physique à ma sortie de l’X mais, issu d’un milieu modeste, sans argent et sans guide, j’ai choisi d’intégrer le corps des Mines qui me garantissait une poursuite d’études rémunérée. J’ai débuté ma carrière au ministère de l’Industrie puis au ministère des Transports où je me suis notamment occupé de négocier des directives européennes à Bruxelles dans le domaine de la sécurité des véhicules. J’ai ainsi découvert l’Europe, cette splendide entreprise collective, et son ambition de paix et d’entente entre les peuples si bien représentée sur sa bannière couronnée d’étoiles... Alors que les mathématiques financières prenaient leur essor, on m’a conseillé de m’orienter vers la finance et j’ai rejoint en 1998 la direction de la Stratégie de Paribas, racheté un an plus tard par la BNP. En 2000, j’ai commencé à travailler sur les dérivés d’actions qui m’ont permis de conjuguer l’environnement ouvert et stimulant des marchés financiers avec mon goût pour les mathématiques. Depuis 25 ans, j’évolue dans le secteur des activités de marché désormais fusionnées au sein de BNP Paribas Global Markets. Celui-ci a beaucoup évolué : au tournant des années 2000, nous fonctionnions en mode start-up avec quelques centaines de personnes. Aujourd’hui, Global Markets représente un écosystème de plus de 10 000 collaborateurs dont la moitié hors d’Europe, et un produit net bancaire de près de 9 milliards d’euros l’an dernier. Je suis fier et chanceux d’avoir contribué à cette construction collective de l’activité des marchés de BNP Paribas. Cette aventure m’a comblé, tant par l’intérêt que j’y ai trouvé, que par la variété, l’internationalisation et la vitesse de changement du secteur. 

On vous sent animé d’une véritable passion pour les mathématiques. Vous êtes d’ailleurs l’un des initiateurs d’une tribune publiée dans Le Monde en décembre 2023 plaidant pour la mise en place d’un plan national maths et sciences. 

La passion des mathématiques m’est vraiment venue en classe prépa, quand, au prix d’efforts confinant à l’ascèse, j’ai réalisé leur puissance et leur beauté. En débarquant en maths sup, j’ai été époustouflé par un problème de physique sur la modélisation des marées, c’était comme si l’univers se découvrait d’un coup écrit dans le langage des mathématiques, pour paraphraser Galilée. La prépa a été le début d’une aventure intellectuelle extraordinaire qui s’est poursuivie à l’X, où j’ai pu admirer la « déraisonnable efficacité des mathématiques ». Plus tard, j’ai été heureux de pouvoir mobiliser cette formation scientifique et logique dans mon travail. C’est aussi pourquoi j’ai essayé de contribuer à ma mesure au soutien des sciences et des maths, à travers la tribune du Monde par exemple qui a été signée par des prix Nobel, des médailles Fields, des académiques, des entrepreneurs, des associations… J’ai également pu faciliter la création du nouveau prix de probabilités « Paul Lévy » décerné par l’École polytechnique, la Fondation de l’X et la Société Mathématique Européenne avec le soutien de BNP Paribas et l’appui de son directeur général, lui-même polytechnicien. D’un point de vue plus personnel, je continue de faire des maths pour le plaisir et j’ai essayé de transmettre cette passion à mes enfants, avec un succès relatif ! 

Que retenez-vous de vos années à Polytechnique ? 

J’ai d’abord gardé des amis pour la vie, c’est important les amitiés solides et durables… Sur le plan de l’enseignement qui était fantastique, les mathématiques appliquées m’ont beaucoup servi dans mon métier de la finance, et d’autres disciplines comme la chimie, la physique, l’informatique ou l’économie m’ont ouvert des perspectives utiles. Tous les professeurs et maîtres de conférences m’ont marqué et j’en garde un souvenir très précis. Je pense par exemple à Jean-Louis Basdevant en physique quantique, à Dominique Rincé en littérature ou à Jean-Pierre Bourguignon, Jean Lannes, Pierre-Louis Lions en mathématiques, Michel Amestoy en mécanique. J’ai même fini par aimer le sport ! 

Votre premier don à la Fondation remonte à 1989, vous faites partie de ses Grands donateurs et vous avez choisi de vous réengager dans le cadre de sa nouvelle campagne de levée de fonds « Servir la science ». Pourquoi est-ce important pour vous de soutenir votre École ? 

Disons que mon engagement trouve sa source dans un souci patriotique et « humaniste ». Je suis convaincu que l’éducation, et notamment l’éducation supérieure, est un facteur de paix et de progrès. Je fais partie de ceux qui pensent que la science et la connaissance permettent de combattre l’obscurantisme, en même temps qu’elles nous donnent à comprendre et apprivoiser le monde. Les mathématiques, la philosophie, les arts ou les lettres forment des jeunes avec des bases de raisonnement solides, attachés à la justesse et la justice, sont vecteurs d’ouverture et peuvent contribuer à rendre le monde meilleur. Il faut des mentors pour animer tout cela. Il faut de très bons instituteurs à l’école primaire, de très bons professeurs au lycée, et il faut des phares académiques. Polytechnique est, et doit être, l’un de ces phares. Par ailleurs, je crois aussi au professionnalisme incarné par l’X. Que ce soient les professeurs, les chercheurs ou l’administration, tous s’occupent avec passion et compétence de leurs sujets et permettent à l’École d’atteindre un niveau d’enseignement et de recherche comparable aux meilleurs standards mondiaux. C’est une chance pour la France et l’Europe de bénéficier de telles institutions. 

Votre promotion célèbre cette année son 40e anniversaire et se réunira sur le campus le 27 septembre prochain à l’invitation de l’X, de l’AX et de la FX. À cette occasion, vous avez impulsé avec quelques camarades donateurs une opération de collecte au bénéfice de nos actions qui a d’ores et déjà permis de réunir plus de 125 000 €. Quel message souhaitez-vous transmettre à vos camarades n’ayant pas encore rejoint le mouvement ? 

Tout au long de nos études, nous avons beaucoup reçu. Nous avons bénéficié d’une formation coûteuse et de très bons professeurs, et nous avons l’opportunité aujourd’hui d’en faire bénéficier les générations qui viennent à leur tour. À côté de la puissance publique, il est important que l’École dispose d’autres sources de fonds mais aussi d’un soutien moral de la collectivité, et en particulier de la communauté des alumni comme cela se fait dans les grandes universités anglo-saxonnes. Grâce à ce soutien à travers la Fondation, l’X a beaucoup évolué et est devenue un institut de science et technologie de stature internationale qui attire des élèves et des professeurs du monde entier, qui fait de la recherche et qui forme des ingénieurs, des scientifiques et des entrepreneurs de haut niveau. Ce mouvement est positif et doit être accompagné. Je tiens à remercier celles et ceux qui ont d’ores et déjà contribué à notre collecte et pour toutes les raisons que je viens d’évoquer, j’invite nos camarades de la 85 qui ne l’ont pas encore fait à faire un don, quel que soit son montant. Toutes les conditions sont réunies pour que nous nous mobilisions encore davantage pour l’X et notre réussite ne pourra être que collective !
 

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