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Des systèmes quantiques uniques dans les semiconducteurs
Microscope à Effet Tunnel adapté à l'étude de spins individuels dans le cadre du projet OneSPIN
Être capable d’isoler un unique atome, une unique molécule, ou tout autre objet microscopique est une prouesse expérimentale récente qui a permis l’essor de ce que beaucoup nomment la « seconde révolution quantique ». Si la première révolution de la physique quantique, développée au XXe siècle a permis un bond de géant dans la compréhension des phénomènes, notamment dans les matériaux, les expériences se sont longtemps limitées à l’étude d’un ensemble de particules. « Les effets purement quantiques, comme la superposition d’état, étaient comme « moyennés » » souligne Fabian Cadiz, chercheur au PMC. Etudier des systèmes uniques permet de garder ces propriétés de « cohérence quantique ».
Des matériaux de très faible épaisseur
Avec le projet OneSPIN, débuté en janvier 2024, Fabian Cadiz et son équipe se penchent sur de nouveaux matériaux : des semiconducteurs épais de quelques couches atomiques seulement à base de matériaux appelés « dichalcogénures de métaux de transition ». Il s’agit par exemple de disulfure de tungstène (WS2). Les électrons de ces matériaux possèdent un spin, une propriété intrinsèque de tous les électrons que l’on peut se représenter de manière approximative comme l’aiguille d’une boussole.
Dans ces semiconducteurs, un électron peut se retrouver piégé dans un « défaut » du matériau (une absence d’un atome à un endroit par exemple). Ces défauts sont créés en chauffant le matériau à très haute température (700 °C) environ. Le spin de cet électron devient alors un système quantique individuel que les scientifiques cherchent à contrôler. « On peut même parler d’" atomes artificiels " car ce système possède des états d’énergie discrets comme un électron dans un atome » explique Fabian Cadiz.
Les états quantiques dans lesquels peuvent se trouver ces spins sont sensibles aux perturbations qui font disparaître ces particularités quantiques au bout d’un certain temps appelé « temps de décohérence ». Des prédictions théoriques envisagent un temps supérieur à 10 microsecondes dans le WS2, ce qui serait exceptionnellement long. Ils pourraient être exploités pour des applications en métrologie, c’est-à-dire des mesures très fines de certaines propriétés comme les champs magnétiques.
Sonder le comportement des électrons
En pratique, cela reste à démontrer et il faut d’abord comprendre ces nouveaux systèmes quantiques d’un point de vue fondamental. En quoi consistent exactement ces défauts ? Comment vérifier leurs propriétés quantiques ? Le projet OneSPIN a pour but d’apporter des réponses à ces questions.
Pour détecter les spins, les chercheurs illuminent le matériau par un faisceau laser. Bien que petite, la zone éclairée contient un très grand nombre d’électrons. Mais les spins uniques réémettent de la lumière à une longueur d’onde particulière qui permet de les distinguer. La première expérience à consister à prouver que ces spins émettent bien des photons uniques, c’est-à-dire photon par photon, une des caractéristiques de leur nature quantique. « Les résultats sont prometteurs » se réjouit Fabian Cadiz.
Avec ses collègues, il prépare désormais la seconde étape. Grâce à un microscope à effet tunnel, ils vont pouvoir cartographier précisément la surface du matériau pour sonder la nature de ces spins. L’expérience devrait commencer d’ici la fin de l’année.
OneSPIN est un projet financé par le Conseil européen de la recherche (bourse ERC Starting 2022)
*PMC : une unité mixte de recherche CNRS, École polytechnique, Institut Polytechnique de Paris, 91120 Palaiseau, France
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