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Une avancée pour la physique et la technologie des photodiodes à spin

Une collaboration internationale incluant le Laboratoire des solides irradiés vient de publier dans Physical Review Letters un article détaillant les mécanismes à l’œuvre pour détecter une lumière polarisée circulairement grâce à des dispositifs de spin-optoélectronique appelés photodiodes à spin.
Une avancée pour la physique et la technologie des photodiodes à spin
04 fév. 2022
Recherche, Technologies, LSI
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Une photodiode à spin est capable de détectée une lumière polarisée circulairement grâce à un empilement de matériaux semi-conducteurs et ferromagnétiques.

L’électronique s’appuie sur une particule élémentaire, l’électron et en particulier sur sa charge électrique. Plus récemment est apparu un autre domaine de recherche, la spintronique, qui ajoute à l’électronique une deuxième propriété quantique de l’électron : son « spin » qui correspond en quelque sorte à une aimantation. Si ses applications sont encore moins développées que celles de l’électronique classique, la spintronique est à la base des têtes de lecture des disques durs des ordinateurs et des mémoires magnétiques, et reste un domaine de recherche en pleine expansion.

« Dans ce travail, nous allions la spintronique avec l’optique.  C’est la spin-optoélectronique » explique Henri-Jean Drouhin, co-auteur de l’étude parue dans Physical Review Letters et responsable du groupe « Physique et Chimie des nano-objets » au sein du Laboratoire des solides irradiés (LSI*). Les particules de lumière, les photons, possèdent en effet également un spin. Ce spin se manifeste notamment dans le fait que la lumière peut être polarisée de façon circulaire droite ou gauche (ce qui signifie que le champ électrique de la lumière s’enroule vers la droite ou vers la gauche comme une hélice dans la direction de propagation des photons). Lorsque cette lumière arrive sur le dispositif conçu par les chercheurs, les photons peuvent exciter les électrons du matériau. Le spin de ces électrons adopte alors une direction préférentielle qui dépend du spin des photons. Savoir extraire sélectivement les électrons permet donc d’obtenir des informations sur la polarisation de la lumière incidente, faisant de ces dispositifs des « photodiodes à spin », à la différence des photodiodes classiques qui mesurent l’intensité de la lumière. 

Grâce aux nanotechnologies, il existe déjà des sources laser qui, à partir du spin des électrons, créent de la lumière polarisée circulairement. Disposer de détecteurs fonctionnant sur le principe inverse permettrait d’ouvrir de nouveaux champs d’applications. « Ils existent, mais ils ne sont pas encore efficaces » précise Henri-Jean Drouhin. Avec ses collègues de l’Unité mixte de physique CNRS/Thales, de l’Institut Jean Lamour (CNRS/Univ. de Lorraine), mais aussi de l’Institut Ioffe de Saint Pétersbourg et de l’Académie chinoise des sciences, ils ont donc mené un travail expérimental et théorique afin de comprendre précisément les mécanismes à l’œuvre dans leur dispositif. Ce dernier est constitué de plusieurs matériaux empilés. Un semi-conducteur (l’arséniure de gallium, déjà très utilisé en électronique), où les photons sont convertis en électrons. Un métal ferromagnétique (alliage de cobalt, fer et bore) dans lequel les électrons pénètrent plus ou moins facilement selon la direction de leur spin et qui permet de récupérer le signal électrique utile. Entre ces deux matériaux, une couche d’isolant (de l’oxyde de magnésium) permet de réguler le passage des électrons par effet tunnel.

Les chercheurs ont réussi à reconstituer les différents mécanismes de création et de disparition d’électrons et trouvé comment les contrôler à l’aide de champs électriques et magnétiques. Il faut un équilibre entre ces mécanismes tout en maintenant la compétition entre les différentes directions de spin des électrons. « Si l’on récupère tous les électrons de façon indifférenciée, alors on n’obtient aucune information » explique Henri-Jean Drouhin.  « Dans notre article, nous avons également parfaitement modélisé théoriquement les phénomènes physiques mis en jeu, et aussi testé que ce modèle fonctionnait pour différentes plages de tensions et de champs magnétiques appliqués au dispositif » souligne Slava Safarov, co-auteur de l’étude au LSI. 

Si ces travaux sont encore très fondamentaux, l’équipe considère qu’ils montrent les pistes à suivre pour développer à l’avenir des détecteurs efficaces qui pourraient servir pour les télécommunications, le traitement de l’information ou la médecine.

*LSI : une unité mixte de recherche CEA, CNRS, École polytechnique - Institut Polytechnique de Paris
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